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PAUL DEMONT, Xénophon et Plutarque dans Der Tod in Venedig de Thomas Mann



                           manuel de mythologie): «Nun lenkte Tag für Tag der Gott mit dem
                           hitzigen Wangen nackend sein gluthauchendes Viergespann durch die
                           Räume des Himmels, und sein gelbes Gelock flatterte im zugleich aus-
                           türmenden Ostwind» (p. 47 Reed).
                                 La comparaison avec le Soleil comporte deux aspects contradic-
                           toires. Thomas Mann commence par noter, avec Plutarque, la simili-
                           tude: «Sowenig ein nicht dazu geübter Körper den Sonnenschein lang
                           aushalten kann, ebensowenig kann eine ungebildete Seele ohne Un-
                           gemach die Liebe ertragen» (Arbeitsnotizen, p. 84 Reed). Cette phrase
                           sur l’impossibilité pour celui qui n’est pas entraîné à supporter la lu-
                           mière du soleil ne peut manquer d’en éveiller d’autres, dans toute une
                           tradition qui remonte au mythe de la caverne dans la République de
                           Platon et qui aboutit à Thomas Mann. Le néo-platonicien Plotin en est
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                           un jalon : «Jamais un œil ne verrait le soleil sans être devenu sembla-
                           ble au soleil, ni une âme ne verrait le beau sans être belle. Que tout
                           être devienne donc d’abord divin et beau, s’il veut contempler Dieu
                           et le beau». Goethe à son tour interprète le thème : «Wär nicht das
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                           Auge sonnenhaft, Die Sonne könnt’ es nie erblicken ; Läg’ nicht in uns
                           des Gottes eigne Kraft, Wie könnt’ uns Göttliches entzücken?». Rudolf
                           Kassner, l’auteur des traductions de Platon que lit Thomas Mann, l’au-
                           teur aussi d’un ouvrage dont rend compte avec admiration Georg von
                           Lukács dans Die Seele und die Formen, que lit Thomas Mann en com-
                           posant Der Tod in Venedig, ouvre ce livre sur Die Mystik, die Künstler
                           und das Leben par un essai intitulé «Der Dichter und der Platoniker.
                           Aus einer Rede über den “Kritiker”» qui est précédé par le début de
                                                                         34
                           la citation de Plotin que nous venons de donner .




                           repéré un autre emploi du mot, bien différent, chez E. Rohde, pour décrire la
                           possession de l’initié par Dionysos (notice de travail n°8): l’enthousiasme apol-
                           linien  d’Aschenbach  deviendra  la  possession  affreuse  et  scandaleuse  par
                           l’ivresse dionysiaque, dans le rêve épouvantable qui le saisit peu avant sa mort.
                           32  Plotin, Ennéades I, 6, p. 106, éd. bréhier, Collection G. budé, Paris, Les bel-
                           les Lettres, 1924.
                           33  Goethes Werke Band I Gedichte und Epen, Textkritisch durchgesehen und kom-
                                                                         1
                           mentiert von Erich Trunz, beck, Müchen, 1989 (1948 ), p. 367.
                           34  R. Kassner, Die Mystik, die Künstler und das Leben, über englische Dichter und


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